COVID-19 : Quel impact sur les entreprises oeuvrant à l’international?
Par Mme Micheline Dessureault | 3 questions – réponses pour les entreprises œuvrant à l’international à propos du COVID-19
Question 1 :
Mon entreprise doit déposer une soumission importante à l’étranger et si nous obtenons le contrat, cela implique que nous devrons livrer nos équipements chez notre client et aussi y envoyer une équipe pour installer cet équipement. Devrions-nous déposer cette soumission ou attendre?
Réponse 1 :
Avec les fermetures de frontières à travers le monde, pour l’instant restreintes aux voyageurs et non marchandises, il n’en demeure pas moins que les choses peuvent changer rapidement.
La durée de cette pandémie est inconnue. Les réponses et mesures divergent d’un pays, état ou province à l’autre, parfois même à l’échelle municipale. Il est donc présentement très risqué de s’engager dans un tel contrat, et ce, principalement quant aux services d’installation puisque les employés seront possiblement empêchés de se rendre à l’étranger, peuvent y tomber malade, voire même être incapables d’en revenir, en plus d’une quarantaine prévisible.
Il est de plus certain que les entreprises auront des problèmes et retards importants dans leurs approvisionnements, tout comme dans leur production à l’usine ou pour trouver des moyens de transport, puisque cette pandémie aura pour effet de diminuer de façon temporaire la main-d’œuvre disponible nécessaire aux opérations habituelles.
Connaissant ces risques, si les deux parties souhaitent toujours contracter, il faudra alors vous protéger adéquatement comme vendeur par les termes d’un contrat écrit, signé par les deux parties, qui comportera une clause de « force majeure » améliorée.
Ce type de clause devra prévoir plus que les cas de catastrophes et désastres naturels, dont les cas d’épidémies/pandémies, quarantaines, fermetures de frontières et autres décisions et mesures des autorités gouvernementales. Il faudra aussi prévoir les retards et incapacités à se trouver des moyens de transport ou à s’approvisionner auprès des fournisseurs en matières premières, composantes, pièces et autres intrants.
Il serait aussi prudent de mentionner que cette clause s’appliquera aussi dans le contexte spécifique de la pandémie du COVID-19, afin qu’il soit clair au contrat que les parties, qui savaient ou pouvaient imaginer qu’il y aurait des possibilités de non-respect du contrat en raison de ce virus, ont néanmoins accepté de contracter ensemble et de se donner une échappatoire dans ce cas particulier et d’actualité.
Le contrat devrait de plus clairement indiquer que la date de livraison n’est qu’une date approximative et qu’aucun défaut, indemnisation ou pénalité ne pourra s’appliquer quant à votre entreprise résultant de telles situations.
Question 2 :
Notre entreprise a commandé des composantes stratégiques de fournisseurs internationaux, qui seront par la suite intégrées à la chaine de production de nos produits au Canada. Nous nous inquiétons de ne pas être en mesure de recevoir nos composantes à temps, puisque les usines chinoises se trouvent dans les zones frappées. Que faire?
Réponse 2 :
Évidemment, tentez de contacter votre fournisseur pour obtenir plus d’informations sur l’état de situation localement.
Prenez également le temps de regarder la documentation contractuelle se rattachant à cette transaction. Si vous n’avez pas signé de contrat écrit, vos échanges documentaires tels bons de commande et confirmations d’acceptation de commande, ou encore simplement soumissions et bons de commande, n’en demeurent pas moins des contrats valides entre les parties.
Une des difficultés est possiblement que ni l’une ni l’autre des parties n’a prévu ce qui se passerait en cas de problème du genre, ni quant à savoir quelles lois et tribunaux auraient juridiction pour régler la situation. Nos avocats spécialisés en commerce international, ayant aussi accès à nos cabinets internationaux affiliés, devraient être consultés et pourront vous éclairer sur la situation juridique précise à laquelle votre entreprise fait face et vous proposer peut-être des solutions.
Même si aucun contrat n’a été signé, il est fort possible que la soumission du fournisseur contienne néanmoins des conditions que vous avez acceptées en envoyant votre bon de commande ou votre paiement. Ces conditions générales pourraient aussi se retrouver sur le site Internet de votre fournisseur, auquel réfère les documents du fournisseur et mentionnant que ces clauses font partie des conditions de vente. Ces termes généraux de vente pourraient aussi avoir été annexés aux documents transmis par votre fournisseur, lesquels sont souvent en petits caractères que peu d’entreprises se donnent la peine de lire.
Si de telles conditions de vente du fournisseur existent, elles prévoiront le plus souvent une clause de « force majeure » (voir question 1 pour plus de détails sur ce type de clause) qui dégagera normalement le fournisseur de toute responsabilité pour défaut ou retard dans un tel cas. Bien que ne mentionnant pas nécessairement les épidémies/pandémies et cas spécifiques du COVID-19, les termes suffisamment généraux utilisés par le fournisseur pourraient inclure cette situation.
Au cas de litige, il est aussi probable que le fournisseur aura prévu que les lois applicables seront les lois de son pays, tout comme ses tribunaux locaux ou arbitrages dans son pays. Il ne vous restera alors que de tenter de négocier ou d’attendre que le fournisseur soit capable de respecter ses obligations, à défaut d’un autre recours possible contre ce fournisseur. Nos avocats spécialisés pourront vous confirmer s’il y a ou non de potentiels recours contre ce fournisseur, à la lumière de votre cas particulier.
Nous vous recommandons également de tenter de vous prémunir contre le défaut d’un fournisseur en diversifiant vos fournisseurs, dans l’espoir que tous ne soient pas également et simultanément affectés par la pandémie, les fluctuations des marchés financiers et les variations de taux de change. Le moment est donc bien choisi pour regarder activement ses capacités d’approvisionnement.
Question 3 :
Notre entreprise devrait-elle penser à modifier ses modèles de contrats, pour être mieux équipée pour faire face à cette pandémie ou autres situations du genre pour l’avenir?
Réponse 3 :
Absolument! Tous vos modèles de contrats internationaux pourront être améliorés, suite à leur revue par nos avocats spécialisés, et adaptés en votre faveur, selon que vous êtes l’acheteur ou le vendeur de produits ou services.
Par exemple, vos contrats de vente de produits et services, soumissions, offres de services, contrats de distribution, d’approvisionnement ou de représentation, bons de commandes, factures et conditions générales, etc.
La clause de « force majeure », notamment, devra être adaptée au cas par cas.
Des pénalités ou mesures d’indemnisation pourront être prévues ou révisées. Les clauses de résiliation du contrat pourront aussi être bonifiées, parmi d’autres.
Il est donc important de demander conseil à nos avocats spécialisés, qui seront aussi épaulés, le cas échéant, par nos cabinets étrangers partenaires, au cas d’application des lois étrangères à votre contrat.
© 2020, Mme Micheline Dessureault
Associée et agent de marques de commerce
Directrice des départements de propriété intellectuelle et affaires internationales
micheline.dessureault@groupetcj.ca