Un décret mettant à jour le Buy American Act a été signé au mois de janvier 2021 afin que les entreprises et les produits américains soient priorisés dans les contrats avec le gouvernement fédéral – ce qui tend à nuire aux échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis.
« Cependant, le Canada a des atouts indéniables dans sa manche. En effet, le président Biden souhaite prendre un virage vert en matière énergétique, estime Francis Généreux. Nous détenons une expertise reconnue mondialement dans ce créneau. De ce fait, les États-Unis auront besoin de nous, ce qui représente un argument de poids pour négocier. »
Qu’est-ce que le Buy American Act?
Le Buy American Act est une loi américaine créée en 1933 qui s’applique aux achats directs de plus de 10 000 $ effectués par le gouvernement des États Unis. Le nouveau décret resserre ces mesures, qui visent la relance du secteur manufacturier et la préservation des emplois aux États-Unis. La nouvelle mouture du Buy American Act a notamment comme objectifs d’offrir plus de clarté et de transparence quant au processus d’attribution de contrats publics, de réduire les échappatoires et de faciliter l’accès des plus petites entreprises à ces contrats.
« Il n’est pas déraisonnable que Joe Biden veuille favoriser l’économie américaine en cette période difficile, d’autant plus qu’il en avait fait une promesse électorale, explique l’économiste principal. Toutefois, le président démontre aussi la volonté de mettre en place des partenariats commerciaux pour contrer la Chine. »
Et le Canada, lui?
Historiquement, le gouvernement canadien démontre une nette tendance à l’ouverture aux marchés internationaux. « C’est normal, le Canada est une petite économie, son propre marché ne se suffit pas à lui-même, note M. Généreux. Il multiplie donc les accords de libre-échange et ouvre son marché aux acteurs mondiaux. Nos politiques d’approvisionnement local respectent les accords de libre-échange signés et les règles du commerce international. La situation de la pandémie aura toutefois suscité des réflexions au Canada comme partout dans le monde quant à la nécessité de favoriser l’économie locale. »
Les conséquences économiques à prévoir
Francis Généreux est d’avis qu’à court terme, le protectionnisme américain n’aura pas un très gros effet. Outre le resserrement des règles du Buy American Act, avec lesquelles les entreprises québécoises étaient déjà habituées à travailler, aucune autre mesure majeure n’a été mise de l’avant.
« Biden veut faire adopter un important plan d’infrastructure, qui entrainera une hausse considérable des dépenses du gouvernement américain, souligne-t-il. Nos entreprises auraient certainement pu en profiter davantage sans ce nouveau décret. Pour les occasions d’affaires, c’est moins avantageux, mais il est normal de vouloir favoriser l’économie locale, c’est un réflexe sain. »
Les tendances de l’heure
Pour le moment, le protectionnisme américain est davantage tourné vers la Chine. En parallèle, la COVID-19 a créé une incertitude qui a naturellement généré une certaine fermeture des marchés. « C’est l’économie américaine qui va le plus progresser dans la prochaine année en raison de son vaste plan de vaccination et des mesures de soutien de l’administration Biden. Une très forte croissance est à venir, prédit l’économiste. Et le Canada va en profiter. »
« En effet, la relance verte que souhaite entreprendre Joe Biden avec un plan environnemental majeur qui se chiffre à plus de 2 000 milliards de dollars américains permettra au Québec de se tailler une place très avantageuse. « Les énergies vertes, c’est un créneau très fort où nos entreprises se distinguent mondialement, note-t-il. Il y aura là de belles occasions à saisir ».
M. Généreux estime que le protectionnisme américain reste une contrainte pour les entrepreneurs canadiens, et ce, malgré les accords de libre-échange. « Un durcissement des règles américaines, même minime, comme on pourrait le voir sous l’Administration Biden, n’est jamais une bonne nouvelle. On a vu avec Donald Trump comment ce type de mesures peut engendrer de l’incertitude pour les entreprises d’ici. Il y a donc toujours un intérêt à diversifier la clientèle internationale. Les gains à faire sont nettement plus intéressants dans une économie plus ouverte. »